Un outil qui permettra aux ostréiculteurs d’activer des mesures de prévention et ainsi d’offrir aux consommateurs une plus grande garantie sanitaire.
L’interdiction de commercialisation des huîtres en décembre 2022 avait été un véritable coup de massue pour les conchyliculteurs du territoire. Une décision qui avait fait suite à la détection du norovirus, responsable d’épidémies de gastro-entérite, lors d’analyses réalisées dans l’étang de Thau. C’est pour éviter au maximum la contamination des coquillages que va être déployé un nouveau système de surveillance de la pollution virale des eaux ostréicoles. Un outil baptisé Oxyvir sur lequel travaillent, depuis quelques années, les producteurs d’huîtres en partenariat avec un centre technique d’expertise agroalimentaire, Actalia, et une unité mixte de recherche.
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Une expérimentation de 6 mois
Mercredi 20 novembre, à l’occasion du congrès des maires, Veolia s’est engagé à accompagner financièrement cette expérimentation nationale dans trois territoires qui avaient été particulièrement affectés par la crise du norovirus : Quiberon (Morbihan), le bassin d’Arcachon et l’étang de Thau. « C’est une opération qui coûte localement 25 000 € et Veolia va nous le financer à hauteur de 16 000 € », précise Patrice Lafont, président du Comité régional de conchyliculture en Méditerranée (CRCM) qui va superviser l’expérimentation. Cette dernière devrait débuter du côté de Loupian d’ici la fin du mois de novembre et se poursuivre jusqu’en avril 2025, période caractérisée par une recrudescence de gastro-entérites.
Cet outil, complémentaire des contrôles déjà réalisés en sortie de station d’épuration, repose sur un indicateur : les bactériophages. « Miroirs du norovirus », ils se trouvent également dans les eaux usées des stations et peuvent ainsi témoigner d’une pollution virale récente des zones conchylicoles. Cet indicateur va permettre de déterminer si le norovirus est infectieux ou inoffensif mais également de quantifier à partir de combien de cellules il existe un risque pour le consommateur. « À ce jour, il n’existe pas d’outil de gestion fiable ni de méthode applicable pour discriminer les norovirus infectieux des norovirus non infectieux dans les huîtres », explique Nicolas Boudaud, directeur scientifique d’Actalia.
Définir une durée de purification des huîtres
La recherche de ces bactériophages est menée par quelques conchyliculteurs depuis quelques années. Et les résultats s’avèrent pour l’instant probants. « Aucun retour client négatif ni aucune suspicion de TIAC (*) n’ont été rapportés pour les lots d’huîtres commercialisés par les ostréiculteurs utilisant cet indicateur viral », assure Nicolas Boudaud. En repérant les lots éventuellement contaminés et en définissant une durée de purification des coquillages avant commercialisation, cette analyse éviterait en effet aux professionnels d’avoir à subir les déboires des précédentes crises, notamment en fermant pendant des semaines.
« Aujourd’hui, le problème c’est qu’il n’existe pas de réglementation en Europe – comme c’est le cas pour les phycotoxines – pour le norovirus. Il y a seulement un principe de précaution qui s’applique dès que le norovirus est détecté », explique Patrice Lafont. Actuellement, les exploitations touchées doivent en effet fermer pour une durée de 28 jours. Un délai « qui ne veut rien dire », pour beaucoup. Le système de surveillance Oxyvir pourrait ainsi devenir un outil de gestion. « Nous serons alertés lorsque le risque se présentera et dans ce cas-là nous pourrons mettre à l’abri nos coquillages puis les purifier le temps qu’il faut », lance le conchyliculteur. Un moyen de sécuriser leur mise sur le marché et d’offrir une plus grande garantie sanitaire aux consommateurs.
Le problème de rejet des eaux usées
Ce procédé novateur entend « répondre structurellement aux défis que posent des événements météorologiques de plus en plus extrêmes », souligne, dans un communiqué, Pierre Ribaute, directeur général de Veolia Eau France. En effet, les fortes pluies font déborder les stations d’épuration et les réseaux d’eaux qui peuvent alors contaminer les huîtres et expliquer la présence de norovirus dans les huîtres, notamment lors de la période hivernale.
À la suite de l’annonce du lancement par Véolia de ce nouvel outil, le comité des usagers du bassin de Thau du cycle de l’eau a tenu à réagir. « Nous constatons sur le bassin de Thau, les insuffisances du traitement des eaux usées par les communes et leurs délégataires Veolia et Suez », écrit-il. Selon lui, « il est obligatoire de mettre fin aux plus de 40 km de réseaux unitaires où se mélangent eaux pluviales et eaux usées, et de moderniser l’ensemble des réseaux d’eau usées ».
Si Patrice Lafont évoque deux points noirs à l’origine de la crise de 2022 à savoir la vétusté des réseaux unitaires et la cabanisation de certains secteurs, il indique que « des efforts ont été faits avec de nombreux investissements réalisés sur le bassin de Thau ». Plus de 166 millions d’euros ont été investis dans des opérations contribuant à la réduction des rejets, comme le rappelle Sète Agglopôle Méditerranée.
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