13 personnes dont trois femmes comparaissent à partir de ce mardi 14 mai devant le tribunal correctionnel de Nîmes pour l’affaire dite « des parfums ». Un trafic international de parfums de luxe revendus 30 % moins cher mis au jour en 2013. Des milliers de flacons et de très importantes sommes d’argent ont été saisis.
C’est une affaire ancienne et atypique. Ancienne car elle remonte à la fin de l’année 2012. Atypique car sur le banc des prévenus, il y a des commerçants, un autoentrepreneur, un professeur de mathématiques, des directeurs d’entreprise, des mères au foyer… 13 personnes dont trois femmes sont jugées à partir de ce mardi 14 mai devant le tribunal correctionnel de Nîmes pour contrefaçon de marchandises, contrebande, recel d’abus de confiance et blanchiment en bande organisée.
Alors qu’ils enquêtent sur un vol avec arme, les policiers interceptent des conversations téléphoniques faisant état d’achat et de revente de parfums de luxe à grande échelle et à très bas prix. Entre 18 et 24 euros le flacon commandé par mail, payé en liquide et envoyé par la poste. Les enquêteurs pensent d’abord qu’il s’agit de produits de contrefaçon. Les investigations révèlent une organisation parfaitement structurée de vente de parfums de marque, par correspondance, en grande quantité et sur toute la France en particulier dans le Sud est (Rhône-Alpes, PACA et Languedoc).
À la tête de l’organisation, deux frères domiciliés en région parisienne apparaissent comme les fournisseurs avec à leur actif une liste de plus de 100 000 parfums envoyée par courriels à des acheteurs. Les paiements, hors de tout contrôle fiscal, sont effectués soit « de la main à la main » lors de la livraison, soit par virement, ou envoyés dans des lettres dont les billets sont cachés dans des revues entourées de papier bulle. Le même mode opératoire est expliqué à tous les niveaux de revendeurs dont les nouveaux membres sont introduits et cooptés par des personnes déjà dans le réseau.
L’interception par la douane de plusieurs colis de parfums envoyés dans des boîtes de chaussures ne contrarie pas le trafic. Les meneurs présumés changent de téléphone et font appel à d’autres transporteurs.
Les enquêteurs découvrent que des parfums de marque tout à fait authentique sont détournés de leur destination d’origine. Les malfaiteurs modifient les emballages des produits à la sortie d’usine, un procédé normalement destiné à des produits hors taxes pour des pays étrangers.
Les enquêteurs estiment que les têtes du réseau revendent a minima 2 euros de plus que le prix d’achat à leurs fournisseurs. Au gré des intermédiaires, l’acheteur final paiera entre 6 et 15 euros de plus que le prix de vente initial.
En novembre 2013, une vague d’interpellations est menée dans dix départements français. Plusieurs revendeurs sont arrêtés dans le Gard et à Montpellier. 7000 flacons de parfum de luxe sont saisis.
Un des principaux prévenus confirme en garde à vue avoir expédié 30 tonnes de parfums, soit 75 000 bouteilles pour un bénéfice annuel de plus de 112 000 euros entre 8 et 9000 euros par mois pour un chiffre d’affaires de plus de deux millions d’euros, non déclarés au fisc. Son épouse, qui bénéficie des prestations sociales de la CAF, mais elle dépense plus de 3500 euros par mois pour des frais de manucure, d’esthétique, de coiffure, l’emploi d’un coach sportif, des voyages à la Mecque et à Dubai.
Pour certains des prévenus, les enquêteurs estiment les bénéfices perçus autour de 20 000 euros mensuels chacun.
10 000 flacons de parfum en moyenne étaient vendus chaque semaine soit plus de 550 000 en une année pour un chiffre d’affaires estimé à près de 16 millions d’euros selon les enquêteurs. Des chiffres contestés par les prévenus soupçonnés d’être à la tête de ce réseau.
Parmi les revendeurs, la plupart peu regardants sur l’origine des produits, certains se sont déclarés comme des autoentrepreneurs sans penser exercer une activité illégale car les parfums étaient authentiques. Pour la justice, le fait de vendre des produits, même authentiques, dont la traçabilité a été modifiée est assimilé à de la revente de produits contrefaits.
Trois sociétés dont le groupe LVMH se sont portées partie civile. Le procès qui débute ce mardi 14 mai doit se poursuivre jusqu’au 17 mai à Nîmes.