À la veille de la feria de Béziers, Midi Libre a mené son enquête pour évaluer les honoraires perçus par les acteurs d’une corrida.
Connaître les cachets exacts des stars de l’escalafon et des éleveurs est un secret-défense difficile à percer. Il existe malgré tout quelques certitudes et on peut ranger les toreros en trois catégories. Une poignée de stars de l’escalafon ont des rémunérations qui se chiffrent en millions d’euros proches de bons footballeurs professionnels.
Une vingtaine de matadors de toros perçoivent des émoluments confortables et la grande majorité ont des revenus modestes voire est obligée d’avoir une autre activité comme Alberto Lamelas, qui est au cartel des Miura, et qui était en parallèle taxi sur Madrid pendant plusieurs années.
Ainsi, un matador qui torée moins de 13 corridas par an (Groupe C) perçoit 10 834 € pour venir dans une arène de 3e catégorie. Une fois payé sa cuadrilla, la commission de son apoderado (environ 15 %) et les frais logistiques, il lui reste environ 2 000 € de cachet desquels il faut déduire ses frais : déplacements, capes, muletas, costumes de lumières (entre 3 500 et 10 000 € selon la qualité)… Bref des revenus modestes pour la majorité des toreros qui font entre un et dix paseos par an.
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250 000 € pour les stars pour combattre deux toros à Madrid
Le montant du minimum syndical, le “convenio”, est également connu. Un torero du Groupe A (qui fait au moins 37 corridas par an) perçoit 22 313 € dans une arène de 1re catégorie. Une somme qui peut être dopée par les droits d’image quand la manifestation est télévisée (environ 3 000 € au total pour le torero et ses subalternes). Il faut déduire les frais, les cachets de sa cuadrilla (1 660 € pour chaque banderillero et picador, 718 € pour le mozo d’espada…) et on estime qu’il reste autour de 6 000 € pour le principal acteur.
Mais les stars de l’escalafon bénéficient de cachets bien plus importants alors que les émoluments de leur cuadrilla restent fixes. Ils sont proportionnels à la jauge de l’arène et leur capacité à la remplir. Ainsi, les Roca Rey, Morante de la Puebla, Talavante et consorts perçoivent 250 000 € pour combattre deux toros à Madrid.
Soit 50 % de la recette quand les 22 000 places de Las Ventas sont vendues. À Pamplona, deuxième arène la plus importante d’Espagne (19 000 places), les honoraires des figuras sont estimés autour de 200 000 €. Ils sont en général réticents pour mettre une part variable conséquente dans leur contrat pour adapter leur honoraire au succès de la fréquentation aux guichets.
Les guichets fermés de Roca Rey ont un prix
De même, certains toreros reconnus peuvent confondre le niveau de leur talent avec leur exigence financière. Car le véritable poids d’un torero est sa capacité à faire le plein. Actuellement, le torero le plus “taquillero” et le plus rémunéré est Andres Roca Rey. Il est le seul à réaliser des guichets fermés au quotidien et ses prétentions dépassent les 100 000 € dans une plaza de 1re catégorie de plus de 10 000 places.
Jouant sur la rareté, José Tomas perçoit plus encore. Il se murmure qu’il aurait touché 600 000 € pour son solo à Nîmes en 2012 et organiser une corrida avec le Monstre de Galapagar génère automatiquement une perte. L’organisateur parie sur l’engouement sur les abonnements pour compenser cet investissement sur les autres corridas de sa feria.
Les chiffres pour les ganaderias tout aussi secrets
Les chiffres concernant les ganaderias sont tout aussi secrets. Élever un toro pendant quatre ou cinq ans coûte entre 5 000 et 6 000 €. Au milieu des années 2010, des éleveurs de renom auraient vendu des corridas entières entre 12 et 15 000 €, soit le prix d’une novillada. Le marché s’est rééquilibré depuis et il semblerait que les prix oscillent aujourd’hui entre 30 et 50 000 €
dans une arène de 1re catégorie en France.
Mais le cachet des ganaderias les plus prestigieuses comme Miura dépasseraient les 70 000 € pour six toros. Pour les éleveurs, une présence dans les plus grandes arènes comme Madrid ou Pamplona est vitale car il se murmure que les lots de toros se sont vendus entre 72 et 120 000 € lors de la dernière feria navarraise. Ces chiffres ne sont que des estimations car la tauromachie n’a pas la culture de transparence du sport américain et seuls les organisateurs et les acteurs connaissent la valeur des contrats signés.
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