Trop longtemps moribonde, la Champions Cup connaît depuis l’arrivée des franchises sud-africaines un regain de forme et d’intérêt. Voici pourquoi.
Il y eut bien sûr, dans le basculement des planètes, une curieuse façon de déshabiller Pierre pour habiller Paul. Et lorsque les franchises sud-africaines ont débarqué en Champions Cup, leur départ de l’hémisphère Sud n’a évidemment fait qu’affaiblir un peu plus un Super Rugby dont les audiences, au stade et à la télé, sont aujourd’hui réduites à néant. Ce n’est pas une vue de l’esprit : car il suffit de jeter un œil aux compétitions de la Sanzaar (l’institution gérant les tournois du Sud, N.D.L.R.) pour tomber, deux fois sur trois, sur des tribunes vides et des mascottes hyperactives tentant comme elles le peuvent de cacher la misère ordinaire…
Au vrai, la volonté des Sud-Africains de rejoindre l’Europe a donc coïncidé au désir des patrons de l’EPCR de relancer une compétition quelque peu moribonde, depuis quelques années. Et quoi ? Une Champions Cup comptant sept équipes françaises qualifiées en huitièmes de finale, comme c’était le cas l’an passé, avait-elle vraiment un sens ? Et au-delà de ça, l’écrasante domination des plus grosses écuries du Top 14, combinée à l’écroulement progressif des pensionnaires du Premiership, éveillait-elle encore un quelconque intérêt chez un grand public bel et bien conscient que seul le Leinster était en réalité capable de rivaliser avec les masses salariales du championnat français ?
Qu’on le veuille ou non, l’irruption dans la bataille des Bulls, Sharks et Stormers, tous trois qualifiés pour les phases finales ayant débuté le week-end dernier, a donc considérablement densifié le tournoi transcontinental, lui donnant le second souffle qu’attendaient diffuseurs, spectateurs et joueurs. « C’est tout sauf une surprise, déclarait récemment l’ouvreur sud-africain de Leicester, Handré Pollard. L’arrivée des franchises sud-africaines en United Rugby Championship avait déjà fait beaucoup évoluer le niveau de cette compétition. Il se passe la même chose aujourd’hui en Champions Cup. » La Coupe d’Europe est morte, vive la Champions Cup ? C’est en tout cas ce que murmurait dimanche ce Stadium de Toulouse, à guichets fermés pour la réception des Bulls, la franchise de Pretoria…
La première pierre à un Mondial des clubs
Avec la récente arrivée dans la danse d’un nouveau diffuseur, à savoir le Sud-Africain Super Sport, les deux compétitions (Champions Cup et Challenge Cup) ont également augmenté leurs audiences de 15 % et quelque peu corrigé le terrible déficit d’image dont elles souffraient jusqu’à présent. Par ailleurs, près de 80 000 billets, sur les 100 000 disponibles pour les finales à l’Aviva Stadium, ont d’ores et déjà trouvé preneurs. Pour autant, les satisfecit des uns et des autres peuvent-ils faire oublier la problématique écologique et le bilan carbone considérablement alourdi par ce changement du format ? À ce sujet, le chairman de l’EPCR Dominic McKay expliquait récemment qu’une commission avait spécialement été créée et que le bilan carbone généré par la compétition serait calculé en fin de saison pour être, si besoin, revu à la baisse lors du tournoi suivant. Il se pourrait aussi que, comme l’ont fait ces Cheetahs ayant stationné en Italie pendant toute la compétition, les franchises sud-africaines aient toutes, à terme, des installations en Europe.
À l’heure de tirer un premier bilan de la Champions Cup la plus métissée de l’histoire, les voyants semblent donc tous au vert, quand bien même l’engouement en Afrique du Sud n’a pas encore comblé toutes les espérances. Et si le renouveau du produit phare de l’EPCR se confirme dans les semaines à venir, si les phases finales de l’épreuve accouchent in fine d’une merveille, cette Champions Cup 2022-2023 serait à n’en pas douter la plus belle rampe de lancement au Mondial des clubs, lequel pourrait voir le jour en 2024…
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