Le président Risson et le procureur Balland, depuis Béziers, ont lancé des messages clairs sur l’état de l’institution judiciaire, son fonctionnement et les obstacles qui se dressaient devant elle.
Les rentrées solennelles des tribunaux sont des moments propices aux revendications. Les chefs de cours sont présents, les élus locaux et nationaux aussi ainsi que le représentant de l’État.
De quoi offrir, c’est espéré dans tous les cas, une belle caisse de résonance à bon nombre de problèmes soulevés. Et c’est ainsi que ce jeudi, lors de la présentation des nouveaux magistrats, le président Risson et le Procureur de la République Balland se sont fendus de propos offensifs.
Ils ont mis en exergue “le manque de moyens de la justice en général et à Béziers en particulier”. Ils ont évoqué le rapport des états généraux de la Justice qui vient d’être publié, lui aussi “accablant”.
Et enfin, ce sont les arrêts de la cour de cassation du 12 juillet 2022 que le procureur Balland a pointés du doigt. “Ils fragilisent nombre de procédures pénales au motif que les enquêteurs n’auraient plus recours à des géolocalisations, des écoutes téléphoniques, ou des interceptions de correspondance électronique, sauf pour des enquêtes criminelles.”
Cette décision a été prise pour se mettre en conformité avec la cour de justice de l’Union Européenne.
Autant, donc, “demander aux enquêteurs de réaliser un bond en arrière de plusieurs décennies et de refuser l’apport des nouvelles technologies dans la résolution de très nombreuses enquêtes”.
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Une période difficile
“La période qui s’ouvre risque de montrer toute la nécessité des soutiens de tous, a assuré le président Risson. Avec le procureur, nous sommes très impliqués dans les fonctionnements des juridictions, ici, à Béziers, mais aussi sur le plan national.”
Il reprend, M. le Président de la République a rappelé que nous vivions un grand bouleversement marqué par la fin de l’abondance… La fin d’une forme d’insouciance avec la crise climatique et la guerre. Malgré ce, vous pourrez compter sur le tribunal de Béziers pour continuer d’avancer.”
“Face à nos difficultés du quotidien, il convient, sans tomber dans un relativisme général, de mettre les choses en perspective. Dans ce contexte sombre n’est-il pas dérisoire de parler des états généraux de la justice ? Notre président a affirmé que notre état de droit avait un coût. Notre justice est l’un des piliers et fonde ce dernier. Elle caractérise le fait que nous vivons dans un pays où les libertés fondamentales sont protégées, où l’arbitraire n’a pas le droit de siéger.”
“Et pourtant notre justice va mal. Il suffit pour s’en convaincre de lire le dernier sondage sur le rapport des Français à la justice. Face à la critique incessante de celle-ci et à la demande des chefs de la cour de cassation le président de la République a dénoncé le 18 octobre 2021 les états généraux de la justice Lors de son lancement, les participants avaient un mandat de liberté et pour faire des propositions, quitte à bousculer quelques positions établies.”
Des constats alarmants
Une série de constats a été dressée. Il ressort de tout cela qu’il faut lancer une réforme systémique de la justice, qu’il faut des moyens conséquents à l’institution y compris quand il s’agit de payer des factures qui viennent grever les moyens de rendre la justice.
Et le président Risson enfonce le clou en s’appuyant sur le rapport : “Pour la première fois, le rapport montre que le problème de la justice est avant tout une question de justice. Il démontre l’état de délabrement avancé de l’institution. La justice ne parvient plus à exercer ses missions. Un point de rupture semble avoir été atteint à l’occasion de la crise sanitaire.”
S’il fallait envoyer un message clair, peut-être politique, mais nécessaire, aux parlementaires, aux élus, à l’état, cela a pour le moins été fait depuis Béziers.
Le sénateur Bourgi soutien les procureurs
“Je suis en accord avec le procureur Balland sur la nécessité d’apporter rapidement les clarifications nécessaires au régime de l’accès aux méthodes à l’initiative du procureur de la République, d’un officier de police judiciaire”, a expliqué le sénateur de l’Hérault, Hussein Bourgi qui soutient dans sa globalité la position des procureurs et des enquêteurs de terrain face à une loi européenne…
“J’ai également conscience que ce sujet invite à nous pencher sérieusement sur le statut et le rôle du parquet en procédure pénale.” Le sénateur va saisir la chambre haute avec d’autres parlementaires via la commission des lois. “Il convient, en priorité, de sécuriser les enquêtes préliminaires et en flagrant délit, conduites par le parquet car la téléphonie est aujourd’hui un facteur central dans l’élucidation des affaires comme le souligne la conférence des procureurs de la République.”
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