Reportage – La nouvelle vie de Rory Kockott au Castres olympique

Le demi de mêlée international français d’origine sud-africaine, Rory Kockott, deux Brennus à son actif avec le CO, a basculé dans le staff du club tarnais. Midi Olympique est allé à sa rencontre à Saint-Lary-Soulan, Au commencement d’une nouvelle vie…

On l’avait quitté le 24 juin dernier, dans le soir de Saint-Denis. Des larmes plein la bière et le cœur meurtri par la défaite de son club de cœur face au MHR, en finale de Top 14. On l’a retrouvé un mois et demi plus tard, sous le soleil de Saint-Lary-Soulan (65), où le CO effectue son traditionnel stage de présaison qui doit conduire les derniers finalistes au rendez-vous de la première journée de championnat, prévue le 3 septembre sur la pelouse du Racing 92.

Rory Kockott est toujours le même mais il a retrouvé le sourire, toute sa gouaille et ses prérogatives ont changé. De joueur légendaire du club poussé hors du groupe de juin, le Sud-africain s’est mué en un entraîneur entraînant, pédagogue au possible avec ses joueurs, conscient de la chance qu’il a de pouvoir officier au plus haut niveau dans un staff qui lui a fait confiance. Le néo-technicien tarnais sait tout de l’immense défi qui l’attend en intégrant le staff de Pierre-Henry Broncan en remplacement de Joe Worsley, en tant que spécialiste de la défense.

Cela fait partie du job d’un demi de mêlée de faire travailler les gros et d’alimenter les trois-quarts. J’ai la passion depuis toujours du jeu et de l’entraînement.

Reparti outre-Manche à l’issue de la dernière saison, l’Anglais a en effet élevé la défense au rang d’art, dans le Tarn. Rory Kockott n’est pour autant pas impressionné. Il a toujours eu le goût du coaching, un peu comme une déformation professionnelle de son poste de numéro 9 : « Je savais depuis longtemps que j’enfilerais un jour la casquette d’entraîneur. Finalement, mon rôle en tant que joueur m’a un peu formé à ça. Cela fait partie du job d’un demi de mêlée, de faire travailler les gros et d’alimenter les trois-quarts. J’ai la passion depuis toujours du jeu et de l’entraînement. »

Le joueur, qui a profité de la saison dernière et de son temps de jeu réduit à peau de chagrin pour se former, avait à cœur de devenir entraîneur en passant par la grande porte. « Si je n’avais pas la passion et l’envie, je ne l’aurais pas fait. J’attends beaucoup de moi, surtout au niveau de l’implication et des détails. La précision me rend heureux. On va essayer d’avoir une évolution qui va nous faire devenir une équipe plus performante encore. Je ne voulais pas que l’opportunité d’entraîner me soit donnée parce que je suis Rory Kockott. Je voulais mériter ce droit. »

« Des réactions inadéquates de mon entourage »

Visiblement, l’international français aux onze sélections a fait ce qu’il fallait pour séduire ses dirigeants. Malgré une petite « affaire » extra-sportive survenue avant la dernière finale, où son épouse s’était fendue d’une communication maladroite sur la gestion de sa fin de carrière de joueur par les dirigeants tarnais sur les réseaux sociaux, personne au club n’a tenu rigueur à la légende.

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Le président Pierre-Yves Revol éteignit très vite le feu : « Il y a eu des moments difficiles pour lui en fin de saison mais nous faisons tous la part des choses. L’important est de pouvoir bénéficier de ses compétences au service du collectif. »

Rory, lui, admettait l’erreur : « La fin de saison difficile que j’ai vécue a amené mon entourage à avoir des réactions publiques inadéquates et je le regrette » réagissait le joueur, avant d’ajouter : « La passion que j’éprouve pour ce club et pour cette ville va bien au-delà de cela. Je suis très heureux de pouvoir intégrer le staff de Pierre-Henry (Broncan), pour lequel j’ai la plus grande considération et auquel j’espère amener ma contribution pour permettre au CO de rester au plus haut niveau. »

Les bases assainies d’une nouvelle collaboration étaient posées. Son intégration dans ce staff qui tourne déjà si bien ? Un pure formalité : « C’était très facile de se fondre dans ce dispositif. Ils m’ont tous mis à l’aise et c’est un plaisir de pouvoir s’appuyer sur l’expérience de ces gars qui connaissent tous très bien le rugby français. Ça me permet de progresser et d’être plus efficace dans mon boulot. »

Voilà donc le demi de mêlée devenu coach, pour le plus grand bonheur de ses coéquipiers qui vont devoir s’habituer à sa méthode. « Par expérience, c’est l’implication des joueurs qui est primordiale. À titre personnel, je me fixe toujours des objectifs réalisables. C’est ce qui nous fait avancer en tant que sportif, non ? C’est important d’avoir des buts. Mais il est encore plus important d’analyser le chemin que l’on prend pour parvenir à les atteindre. Abandonner n’est pas dans mon vocabulaire. J’attends de vivre une nouvelle belle aventure sportive mais aussi une aventure humaine. »

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Un entraîneur bavard

Les mots claquent et résonnent dans le ciel de Saint-Lary-Soulan. Les Castrais sont prévenus, Kockott n’est pas là pour faire de la figuration. Le taiseux Worsley est remplacé par la gouaille du Sud-Africain, que l’on entend déjà beaucoup, en Français comme en Anglais, histoire de s’adapter en toutes circonstances à son auditoire. « Come on, boys ! », « stay lower ! », « précision jeu au pied ! », les consignes fusent. L’ancien joueur est un entraîneur tout neuf, mais il dégage déjà l’assurance des vieux briscards du rôle. « Je parle et je communique beaucoup. Le plus important pour moi c’est de rester fidèle à ce que nous sommes. Je veux être comme je suis, surtout sur le terrain. Dans la façon dont je m’entraîne mais aussi dans la façon dont je suis en tant qu’homme. Il faut avoir du recul dans la relation que l’on a avec les joueurs, pour en sortir le meilleur sur les matchs. »

Cela doit être bizarre pour eux mais dans le rugby, c’est quelque chose de plus ou moins normal d’être entraîné un jour par un gars plus âgé avec qui on a joué. Il faut que la relation soit naturelle. Il faut de l’honnêteté. Il ne faut pas être faux. La communication sera très importante, il faudra beaucoup se parler.

Tout le sel de son travail sera de parvenir à mettre de côté la part d’affectif développé avec ses coéquipiers durant ses onze saisons de joueur. Comment pourra-t-il donc coacher Benjamin Urdapilleta ou Thomas Combezou, avec qui il a été si souvent au combat ? « Cela sera difficile, surtout pour eux (rires). Blague à part, cela doit être bizarre pour eux mais dans le rugby, c’est quelque chose de plus ou moins normal d’être entraîné un jour par un gars plus âgé avec qui on a joué. Il faut que la relation soit naturelle. Il faut de l’honnêteté. Il ne faut pas être faux. La communication sera très importante, il faudra beaucoup se parler. »

Une chose est certaine, à le voir s’ébrouer et donner de la voix sur la champêtre pelouse saint-laryenne, on retrouve le grand Rory Kockott. Celui qui régnait sur le championnat et qui en fut le meilleur demi de mêlée. Comme sur les pelouses de Top 14, Kockott est comme investi d’une mission divine. Il n’hésite pas à donner de sa personne durant les exercices, à mimer les situations pour faciliter la compréhension de tous.

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En fin de séance, il ne peut pas s’empêcher de participer à un dernier exercice optionnel, où il se fait encore plaisir en assénant quelques plaquages bien sentis sur Baptiste Delaporte ou Adrea Cocagi. Il estime ses ex-coéquipiers dans les temps de passage espérés au vu de la préparation quelque peu amputée par une reprise tardive, finale oblige : « On ne vient pas en stage seulement pour délocaliser. Si on est là, c’est aussi pour profiter d’un autre environnement et inciter les joueurs à avoir une meilleure implication. On a moins de temps que d’habitude et je pense qu’on doit être le plus efficace possible, dans le peu de temps que nous avons. Chaque minute passée sur la pelouse doit être optimisée et nous travaillons en ce sens. »

Les Tarnais pourront compter sur l’expérience acquise la saison passée au terme d’un exercice soldé par cette défaite de triste mémoire en finale : « On sait bien toutes les bonnes choses que nous avons accomplies la saison dernière, reprend le Sud-Africain de naissance. Nous avons raté la dernière marche et c’est une leçon. Cela nous servira à l’avenir pour nourrir l’évolution de chacun. » Au moment d’aller plus en avant dans l’analyse et d’expliquer ce qui n’a pas marché ce fameux 24 juin, Rory redevient Kockott et l’humour prend le dessus : « Je ne peux pas répondre. Il faut que j’aille encore regarder le match, je n’ai pas encore trouvé ce qui n’a pas marché ! »

L’emblématique demi de mêlée, adulé dans le Tarn, est à un nouveau tournant de son parcours. Gageons qu’il y connaîtra autant de succès que dans sa première vie de joueur.


Digest…

Rory KOCKOTT

Entraîneur de la défense du CO

Né le : 25 juin 1986 à East London (Afrique du Sud)

Mensurations : 1,80 m ; 82 kg

Poste : Demi de mêlée

Clubs successifs : Golden Lions, Natal Sharks, Sharks, Lions, Castres olympique (depuis 2011)

Sélections nationales : 11, en équipe de France (2014)

1er match en sélection : à Marseille, en novembre 2014, France – Fidji (40-15)

Points en sélection : 15

Palmarès : champion de France (2013, 2018) avec le Castres olympique

https://www.midi-olympique.fr/2022/08/14/reportage-la-nouvelle-vie-de-rory-kockott-au-castres-olympique-10487617.php

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