Le directeur du Sdis 34, Éric Florès, évoque cet été à très hauts risques.
Avez-vous déjà connu pareille saison, en matière de nombre d’incendies et des risques ?
Cette saison s’apparente à celle de 2003 avec cette sécheresse exceptionnelle, le nombre de feux et la précocité de la saison. Depuis quasi 20 ans, on n’a pas eu une saison aussi forte. Ça fait un mois et demi qu’on est sur un rythme très intense et que l’on continue à avoir des départs. La saison s’annonce encore longue et intense… On anticipe une saison de deux mois encore. Les craintes : c’est que la ressource ne s’épuise pas car l’engagement se fait sur tous les fronts. La population peut être fière.
Quelle est votre principale préoccupation ?
Notre sujet : c’est de maintenir la capacité opérationnelle car le nombre de feux ne va pas baisser. Le niveau de sécheresse augmente tous les jours. Et le risque s’intensifie chaque jour. Alors le sujet, c’est de rester en capacité opérationnelle malgré l’étendue des feux. Et sachant que ce n’est pas tout puisqu’on a aussi l’activité quotidienne et la surveillance des plages, en pleine saison touristique.
Tous les jours, pas loin de 1 000 sapeurs pompiers sont engagés sur les feux de forêts, les secours quotidiens et la surveillance des plages. L’objectif numéro 1 est de bien s’assurer de notre organisation optimale pour le service public et de prendre soin des femmes et hommes sapeurs-pompiers, professionnels (30 %) ou volontaires (70 %), qui s’exposent sur chaque intervention.
Sur combien de départs de feux partent vos hommes chaque jour ?
En ce moment, il y a des journées à 25-30 feux, d’autres c’est plutôt entre 15 et 20 départs. Ce qui est très important. Et comme la saison s’annonce longue, l’objectif est la sécurité de nos personnels sur toutes les interventions.
Comment vont les pompiers après des semaines à ce rythme hyper soutenu ?
C’est un mélange de satisfaction de la mission accomplie (pas de blessé, pas de maison brûlée, pas de casse). Mais il y a des moments où on commence à ressentir la fatigue. Il faut rester avec une acuité maximale face au risque.
Aucun pompier de l’Hérault n’a été blessé durant cette saison pour l’heure…
Il y a eu des petits coups de chaud mais pas de blessé important. Mais chaque feu est dangereux. Il n’y a pas d’intervention anodine. En ce moment, les vitesses de propagation sont très rapides. Cela bouleverse notre méthodologie. On doit anticiper cette évolution rapide avec des phénomènes thermiques, tels que des sauts de 200 mètres par exemple. À partir de fumerolles, le feu repart 200 mètres plus loin. Très régulièrement, le feu nous passe ainsi par-dessus.
Avez-vous les moyens matériels et humains d’assurer vos missions ?
On a suffisamment de moyens mais il est important de réfléchir, si les saisons comme celles-ci se reproduisent, à une évolution de notre réponse. Cela posera la question de la cohérence de nos moyens humains par rapport à l’évolution des risques. Par ailleurs, on est aujourd’hui le seul département de France à disposer d’une flotte d’avions louée par le Sdis (trois avions et un hélicoptère). Ce qui a un coût de 2,5 millions d’euros par an. Ils sont d’une utilité très forte, sont rapides. On les envoie sur tous les départs.
Comment avez-vous réagi en apprenant qu’un pompier volontaire de Saint-Jean-de-la-Blaquière a été arrêté pour plusieurs feux ?
Je prends ça comme une trahison, c’est intolérable, inacceptable. C’est une incompréhension totale dans un département où on a perdu un sapeur-pompier il y a six ans dans un feu de forêt (à Gabian NDLR). C’est criminel.
Une quarantaine de maisons sauvées
“Sur le feu d’Aumelas, on a identifié une quarantaine de maisons qui étaient dans l’axe du feu et que l’on a sauvées, sans doute une valeur de plus de 10 millions d’euros. Et il n’y a pas de victime. Et ce n’est pas “par chance”, c’est grâce à l’action des services de secours”, souligne Éric Florès. Ce dernier rappelle d’ailleurs à quel point il est plus facile de “défendre” une maison débroussaillée.
Sur le volet prévention, il pointe aussi du doigt les jets de mégots sur les bords des routes : “une vraie calamité.” “Il faut une prise de conscience forte des fumeurs. On travaille enfin pour la fermeture des massifs (Caroux, Gardiole, Pic Saint-Loup) en fonction de la carte des risques. Il faut savoir que dans la forêt, il n’y a pas que les arbres qui brûlent mais aussi toute une faune prise en étau, des écureuils, des lapins…”
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