Le droit de résister : manifeste féministe

Depuis le 24 février, la guerre en Ukraine a fait l’objet de nombreuses déclarations, y compris au sein du mouvement féministe international. Pourtant, la voix collective des féministes ukrainiennes n’a pas été entendue jusqu’à présent. Nous publions ici leur manifeste qui défend le droit des femmes ukrainiennes de résister à l’agression impérialiste russe et de déterminer de manière autonome leur stratégie politique face au gouvernement ukrainien. Les féministes ukrainiennes appellent les féministes du monde entier à soutenir leur lutte. Pour soutenir ce manifeste, vous pouvez le signer ici : https://forms.gle/SvPJFpcWPJN7VP9v9

« Le droit de résister : manifeste féministe »

Nous, féministes d’Ukraine, appelons les féministes du monde entier à la solidarité avec le mouvement de résistance du peuple ukrainien contre la guerre impérialiste prédatrice déclenchée par la Fédération de Russie. Dans les récits de guerre, les femmes* apparaissent souvent comme victimes. Pourtant les femmes* jouent également un rôle clé dans les mouvements de résistance, tant sur la ligne de front que sur le front intérieur : de l’Algérie au Vietnam, de la Syrie à la Palestine, du Kurdistan à l’Ukraine.

Les autrices du manifeste « Résistance féministe contre la guerre » refusent aux femmes* ukrainiennes ce droit à la résistance, qui constitue un acte fondamental de l’autodéfense des opprimé-e-s.
Nous considérons au contraire la solidarité féministe comme une pratique politique qui doit écouter les voix des personnes directement affectées par l’agression impérialiste.
La solidarité féministe doit défendre leur droit à décider de manière autonome de leurs besoins, de leurs objectifs politiques et des stratégies pour les atteindre.

Les féministes ukrainiennes ont lutté contre les discriminations systémiques, le patriarcat, le racisme et l’exploitation capitaliste bien avant le moment présent.

Nous avons mené, nous menons et nous continuerons à mener cette lutte en temps de guerre comme en temps de paix. Mais l’invasion russe nous oblige à concentrer nos forces sur la lutte de défense générale de la société ukrainienne : la lutte pour la survie, pour les droits et libertés élémentaires, pour l’autodétermination politique.
Nous appelons à une appréciation informée d’une situation spécifique au lieu d’une analyse géopolitique abstraite qui ignore le contexte historique, social et politique. Le pacifisme abstrait qui condamne toutes les parties prenant part à la guerre conduit à des solutions pratiques irresponsables. Nous insistons sur la différence essentielle entre la violence comme moyen de soumission et comme moyen légitime d’autodéfense.

L’agression russe met en péril les acquis des féministes ukrainiennes dans la lutte contre l’oppression politique et sociale.

Dans les territoires occupés, l’armée russe utilise le viol de masse et d’autres formes de violence sexiste comme stratégie militaire. L’établissement du régime russe dans ces territoires fait peser la menace de criminalisation des personnes LGBTIQ+ et de décriminalisation de la violence domestique.
Le problème de la violence domestique s’aggrave dans toute l’Ukraine.
La destruction massive des infrastructures civiles, les dégâts environnementaux, l’inflation, les pénuries et les déplacements de population mettent en danger la reproduction sociale.

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La guerre intensifie la division sexuelle du travail, en reportant encore plus sur les femmes le travail de reproduction sociale dans des conditions particulièrement difficiles et précaires.

La hausse du chômage et l’attaque des droits du travail par le gouvernement néolibéral exacerbent les problèmes sociaux. Fuyant la guerre, de nombreuses femmes* sont contraintes de quitter le pays et se retrouvent en position vulnérable en raison des difficultés d’accès au logement, aux infrastructures sociales, à un revenu stable et aux services médicaux (y compris la contraception et l’avortement). Elles risquent également d’être victimes de la traite d’êtres humains.

Nous appelons les féministes du monde entier à soutenir notre lutte. Nous exigeons :

  • le droit à l’autodétermination, la protection de la vie et des libertés fondamentales et le droit à l’autodéfense (y compris armée) pour le peuple ukrainien – ainsi que pour les autres peuples – contre l’agression impérialiste ;
  • une paix juste, basée sur l’autodétermination du peuple ukrainien, tant dans les territoires contrôlés par l’Ukraine que dans ses territoires temporairement occupés, et prenant en compte les intérêts des travailleuses et travailleurs, des femmes, des personnes LGBTIQ+, des minorités ethniques et des autres groupes opprimés et discriminés ;
  • la justice internationale pour les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité commis pendant les guerres impérialistes menées par la Fédération de Russie et par d’autres pays ;
  • des garanties de sécurité effectives pour l’Ukraine et des mécanismes efficaces pour prévenir de nouvelles guerres, agressions, escalades de conflits dans la région et dans le monde ;
  • la liberté de mouvement, la protection, la sécurité sociale pour tous les réfugié·e·s et les personnes déplacées à l’intérieur du pays, quelle que soit leur origine ;
  • la protection et l’expansion des droits des travailleurs et des travailleuses, l’opposition à l’exploitation et à la surexploitation, la démocratisation des relations professionnelles ;
  • la priorité accordée à la sphère de la reproduction sociale (crèches, écoles, hôpitaux, aides sociales, etc.) dans la reconstruction de l’Ukraine après la guerre ;
  • l’annulation de la dette extérieure de l’Ukraine (et d’autres pays de la périphérie du système capitaliste mondial) pour la reconstruction d’après-guerre et la prévention de nouvelles politiques d’austérité ;
  • la protection contre les violences sexistes et la garantie de la mise en œuvre effective de la Convention d’Istanbul ;
  • le respect et l’extension des droits et des capacités des personnes LGBTIQ+, des minorités nationales, des personnes handicapées et des autres groupes discriminés ;
  • le renforcement des droits reproductifs des filles et des femmes, y compris les droits universels à l’éducation sexuelle, aux services médicaux, aux médicaments, à la contraception et à l’avortement ;
  • la visibilité et la reconnaissance du rôle actif des femmes dans la lutte anti-impérialiste ;
  • l’inclusion des femmes dans tous les processus sociaux et de prise de décision, en temps de guerre comme en temps de paix, sur un pied d’égalité avec les hommes.

Aujourd’hui, l’impérialisme russe menace l’existence de la société ukrainienne et affecte le monde entier. Notre lutte commune contre l’impérialisme exige des principes partagés et un soutien mondial. Nous appelons à la solidarité et à l’action féministes pour protéger les vies humaines ainsi que les droits, la justice sociale, la liberté et la sécurité.

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Nous défendons le droit de résister.

Si la société ukrainienne dépose les armes, il n’y aura plus de société ukrainienne.

Si la Russie dépose les armes, la guerre prendra fin.

(Premières signatures)

Au 08.07.2022, 346 personnes et 31 organisations avaient signé le manifeste.

First list of international signatures : Organisations

Collectifs Juntas ! Brésil / Collectif vaudois de la Grève féministe, Suisse / Jeune Europe féministe, paneuropéenne / Égalité Bahamas, Bahamas / Love Care Home, Activisme pour les droits des femmes et des enfants (Inde) / Center for Empowering Refugees and Immigrants, santé mentale et services sociaux pour réfugiés et immigrants (États-Unis) / Feminist Fightback, Collectif féministe anticapitaliste (Royaume-Uni) / Où sont les femmes, formation de sensibilisation au genre (Inde) / Union Syndicale Solidaire (France) / Fédération SUD éducation (France) / Réseau européen de solidarité avec l’Ukraine (Belgique) / Warszawski Strajk Kobiet/Grève des femmes de Varsovie (Pologne) / CLARA Collectif Féministe International (République Tchèque) / Spatium Libertas AC (Mexique) / Koster/Fire, groupe d’initiative féministe (Russie) / Vitsche eV, Mouvement de la société civile, Berlin (Allemagne)

Organisations ukrainiennes :

Feministychna Maisternia / Atelier féministe, organisation féministe/ Rebel Queers, organisation féministe/ Feministychna Loga, organisation féministe de base fournissant actuellement une aide humanitaire aux femmes vulnérables et à leurs familles/ Sfera, Organisation représentant la communauté LGBT+ et les femmes de l’est de l’Ukraine/ Insha organisation féministe et inclusive LGBTQI+ de la ville de Kherson/ FemSolution, initiative féministe de terrain/ Insait, organisme LGBTQI+/ Centre d’études sociales et de genre ’’New Life’’, organisation de défense des droits humains spécialisée dans l’intégration du genre et la lutte contre les violences basées sur le genre / Development of Democracy Center, organisation de défense des droits de l’homme/ Khlib Nasushnyi coopérative freeganic horizontale, engagée dans l’activisme alimentaire / QueerLab, Coopérative qui fournit des lieux de travail et/ou des services et produits nécessaires aux réfugiés/ Institute of Gender Programs, Organisation de promotion des droits de l’homme et de l’égalité des sexes dans le secteur de la défense dans le contexte de l’agression russe/ DOM48.24, droits des femmes, développement de l’entrepreneuriat social, développement de la culture / Sotsialnyi Rukh, organisation de gauche qui défend les principes du pouvoir populaire, anticapitalisme, antixénophobie/ Politychna Diya Zhinok, Défendre les droits politiques des femmes/ Ekolohichna Platforma, Éco-anarchistes

Signatures individuelles

Elisa Moros, militante féministe et anticapitaliste, NPA, Collectif féministe ENSU (France) / Alessandra Mezzadri, économiste politique féministe, SOAS (Royaume-Uni) / Stefanie Prezioso, MP-Ensemble à Gauche, Professeur d’Histoire Université de Lausanne (Suisse) / Catherine Samary, Economiste et politologue (France) / Ludivine Bantigny, Historienne (France) / Zofia Malisz, Razem (Pologne) / Kavita Krishnan, militante féministe marxiste (Inde) / Riki Van Boeschoten, professeur d’anthropologie, Université de Thessalie (Grèce) / Geneviève de Rham, Féministe, militante syndicale (Suisse) / Christine Poupin, porte-parole NPA (France) / Paula Kaufmann, Coletivo Juntas ! (Brésil) / Sherry Baron, médecin de santé publique et professeur, City University of New York (États-Unis) / Dawn Marie Paley, journaliste (Mexique/Canada) / Elea Foster, réviseure (Grèce) / Joel Beinin, professeur d’histoire Donald J. McLachlan, émérite, Université de Stanford (États-Unis) / Sonia Mitralia, Feminist Asylum, ENSUFEMINIST (Grèce) / Vivi Reis, Députée fédérale, PSOL (Brésil) / Nancy Holmstrom, professeure émérite de philosophie, Rutgers University, New Politics journal (États-Unis) / Fernanda Melchionna, Députée fédérale, PSOL (Brésil) / Céline Cantat, Sociologue (France) / Nadia Oleszczuk, KP Youth OPZZ / syndicat (Pologne) / Laura Esikoff, psychanalyste (États-Unis) / Sâmia Bomfim, Députée fédérale, PSOL (Brésil) / Luana Alves, Conseillère de São Paulo, PSOL (Brésil) / Marie Fonjallaz, Grève féministe Vaud/Feminist strike Vaud (Suisse) / Frieda Afary, bibliothécaire irano-américaine, auteur de « Socialist Feminism : A New Approach » (USA) / Ania Deryło, FemFund (Pologne) / Janna Araeva, féministes de Bishkek (Kirghizistan) / Athena Moss Sypsa, artiste (Grèce) / Penelope Duggan, Point de vue international (France) / Nurzhan Estebes, Initiative féministe de Bichkek (Kirghizistan) / Yuliya Yurchuk, historienne, Université de Södertörn (Suède) / Nino Ugrekhelidze, militante féministe, responsable des partenariats philanthropiques chez VOICE Amplified (Géorgie) / Rohini Hensman, écrivain, chercheur et activiste (Inde)/ Gabriele Dietrich, Mouvement des femmes Pennurimai Iyakkam, Tamil Nadu (Inde)/ Pamela, journaliste indépendante (Inde)/ Meera Sanghamitra, Alliance nationale des mouvements populaires engagés pour un monde sans nucléaire ni guerre (Inde)/ Irina Novac, Activisme féministe (Roumanie)/ Shubhra Nagalia, Gender Studies, School of Human Studies, Faculté (Inde) / Kelly Shawn Joseph, travailleuse humanitaire, travaille sur les droits des femmes (États-Unis) / Jacline Choulat, Grève féministe Vaud / Grève féministe vaudoise (Suisse)/ Elisabeth Germain, militante féministe (Canada)/ Shabnam Hashmi, militante socialiste/démocratie/égalité des sexes/ANHAD (Inde)/ Ranjana Padhi, militante féministe et auteure (Inde)/ John Meehan, militant (Irlande)/ Dawid Zygmunt, Razem (Pologne)/ Dan La Botz, coéditeur, New Politics (États-Unis)/ Sam Farber, professeur retraité (États-Unis)/ Thomas Harrison, enseignant retraité (États-Unis)/ Hewson Susie, Bodywise (UK) Ltd – Natracare, équité menstruelle (UK)/ Anuradha Banerji, Activiste, Saheli Women’s Resource Centre, New Delhi (Inde)/ Ashima Roy Chowdhury, Centre de ressources pour les femmes sahéliennes, New Delhi (Inde)/ Lewis Emmerton, SheDecides (Royaume-Uni)/ Melampianaki Zetta, équipe éditoriale de www. elaliberta.gr (Grèce)/ Ema Kurtova, organisation féministe « Aspekt » (Slovaquie)/ Vanessa Monney, Grève féministe Suisse/Collectif Femist strike Switzerland (Suisse)/ Huayra Llanque, Attac (France)/ Carla Bonfichi (Italie)/ Catherine Bloch-Londres, Attac (France)/ Jean Batou, Député d’Ensemble à Gauche, Réseau Penser l’Émancipation (Suisse)/ Christiane Marty, membre de la Fondation Copernic (France)/ Ferrua, Julie, Secrétaire nationale de l’Union Syndicale Solidaires (France)/ Rao Vijay Rukmini, militante féministe (Inde)/ Lissy Joseph, Syndicat des travailleurs domestiques de Telangana (Inde)/ Murielle Guilbert, Co-porte parole Union Syndicale Solidaires (France)/ Cybèle David, secrétaire nationale de l’Union syndicale Solidaires (France)/ Janick Schaufelbuehl, historien (Suisse)/ Nara Cladera, Fédération SUD éducation(France)/ Lucie Hulin, Fédération SUD éducation (France)/ Thomas Weyts, SAP – Antikapitalisten (Belgique)/ Sasha, Résistance féministe anti-guerre (Russie)/ Jana Juráňová, écrivain, traductrice (Slovaquie)/ Marta Puczyńska, féministe, militante anti-répression (Pologne)/ Maryna Shevtsova, professeure invitée, Université de Ljubljana (Slovénie)/ Tereza Hendl, Philosophe, fondatrice du Central and East-European Feminist Research Network (République tchèque)/ Liliya Vezhevatova, militante féministe, membre de la Résistance féministe anti-guerre (Russie)/ Sherin Idais, étudiante (Palestine)/ Elisabetta Michielin, informatique/Le Baba Jaga Pordenone (Italie)/ Julia Escalante De Haro, RAÍCES Análisis de Género para el Desarrollo/RAÍCES Gender Analysis for Development (Mexique)/ Daniel James, philosophe (Allemagne)/ Mina Baginova, anthropologue sociale et militante (République tchèque)/ Anicet Lossa Lonjiringa, Association pour la préservation et la protection des écosystèmes lacustres et l’agriculture durable (RD Congo)/ Francesca Tosto, Retraitée (Italie)/ Eugenia Benigni, experte et militante internationale en genre et inclusion sociale (Italie)/ Mila, étudiante (Russie)/ Artem Kotov, linguistique, enseignement de l’anglais (Russie/USA)/ Carol Mann, Femmes en guerre (France)/ Ekaterina Molodec, gérante (Russie)/ Natalia Skoczylas, militante antiviolence et antidiscrimination (Pologne)/ Katarzyna Augustynek, féministe intersectionnelle (Pologne)/ Aida A. Hozić, professeure agrégée, relations internationales (États-Unis)/ Kristen Ali Eglinton, ethnographe appliquée et chercheuse féministe ; co-fondateur et directeur de la Footage Foundation (États-Unis)/ Marianne EBEL, Feminist Asylum, Marche mondiale des Femmes/Global Women’s March, Collectif neuchâtelois de la grève féministe/Feminist strike Neuchâtel collective (Suisse)/ Tetyana Lokot, professeure associée, Dublin City University (Irlande), Etc

PLUS INFO  Dépôt de plainte de notre camarade mutilé le 23 mars

First list of Ukrainian signatures : https://commons.com.ua/en/right-resist-feminist-manifesto/

>> https://www.solidaires.org/media/do…

http://solidaires34.org/spip.php?article3945

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